Enseignée de façon vivante et efficace, la conjugaison n'a pas besoin d'être étudiée pendant neuf ans, du CP à la 3ème, comme c'est le cas actuellement et ce, depuis des années. En effet, il est demandé aux élèves de savoir la valeur des temps alors qu'ils ne maîtrisent même pas la conjugaison. C'est mettre la charrue avant les bœufs!
N'en pouvant plus de répéter de classe en classe, sans sens et repères solides, les mêmes verbes aux mêmes temps, les élèves francophones se désintéressent souvent de la conjugaison et n'ont pas envie de faire d'efforts pour l'apprendre. Ils ne connaissent pas le système de la conjugaison, confondent les modes et les temps - pourtant, ils portent la conjugaison en eux puisqu'ils savent parler - et, ainsi, ne peuvent pas les utiliser pour orthographier les verbes dans leurs divers écrits. Pour mobiliser leur attention et solliciter leur mémoire, les élèves ont besoin de sens, d'organisation et de fantaisie : des verbes très variés, de l'action, des mimes, des supports attrayants, des astuces, des jeux, des concours...
Proposé dans les classes primaires et celles du collège, l'apprentissage de la conjugaison se fait agréablement, progressivement et intelligemment, de manière vivante et ordonnée, notamment à l'aide des cinq outils suivants :
À l'exception des six modes mis en titre, ce tableau muet de conjugaison (inspiré de celui mis au point par Christiane et Maurice Laurent) est composé
- de rectangles pour les temps des différents modes (8 pour l'indicatif, 2 pour l'impératif, 4 pour le subjonctif, 3 pour le conditionnel, 2 pour le participe et 2 pour l'infinitif)
- de points qui représentent les pronoms personnels ou leur absence (6 ou 3 pour les modes personnels et 1 pour les modes impersonnels).
Ainsi, en fonction de son mode, son temps et sa personne ou son absence de personne, chaque verbe a sa place ou ses places dans le tableau. Par exemple, "nous marchions" a deux places : au 4e point de l'indicatif imparfait (2e rectangle en haut à gauche dans l'indicatif) et au 4e point du subjonctif présent (1er rectangle en haut à gauche dans le subjonctif).
Le tableau est présenté aux élèves progressivement à l'aide d'un pointeur et au moyen d'exercices variés. En voici deux exemples :
- Soit le professeur dit par exemple “ils traverseront” et un élève pointe au bon endroit ou pas. Les autres élèves regardent et se taisent pour laisser à celui qui pointe la possibilité de chercher et de se corriger lui-même s'il s'est trompé. Si l'élève n'y arrive pas tout seul, il peut demander de l'aide.
- Soit le professeur reste silencieux et montre avec le pointeur un verbe d'une liste qu'il a affichée à côté et un point du tableau, et c'est à un élève donner sa réponse oralement ou à tous les élèves de donner leur réponse par écrit s'il s'agit une interrogation.
À force de pratiquer la conjugaison sur ce tableau, les élèves en installent un virtuel dans leur tête auquel ils peuvent se référer à tout moment, même s'ils n'ont pas le réel sous les yeux, et peuvent ainsi utiliser et écrire correctement les verbes au sein de phrases.
Elle se pratique pour les temps simples, avec des fiches de radicaux de verbes des différents groupes (ou directement sur le tableau) et des lettres magnétiques pour les terminaisons.
Les élèves peuvent ainsi voir en mettant ou en enlevant certaines lettres, sortes de tours de passe-passe, comment, en conservant les personnes, ils glissent dans un sens comme dans l'autre. En voici quelques exemples :
- de l'indicatif imparfait au passé simple : je dodelin-ais / je dodelin-ai
- de l'indicatif présent à l'imparfait ou au subjonctif présent : nous balbuti-ons / nous
balbuti-ions / que nous balbuti-ions
- de l'indicatif présent à l'impératif présent : tu essui-es / essui-e!
- de l'indicatif présent au passé simple : ils resplend-issent / ils resplend-irent
- de l'indicatif futur au conditionnel présent : je résoud-rai / je résoud-rais
- de l'indicatif présent au subjonctif présent : tu voi-s / tu voi-es
Ludiques et variés, les multiples exercices avec les radicaux et les lettres magnétiques facilitent les prises de conscience, la mise en place de réflexes et la mémorisation.
Fabriqués par les élèves avec des feuilles de dessin en 180 g, les dépliants comprennent généralement douze pages, grâce à un système astucieux de pliage, découpage et montage. Ils permettent de travailler la conjugaison des verbes les plus difficiles des trois groupes, ainsi qu'être et avoir, aux différents modes, temps et personnes. C'est toujours le 3e groupe qui a le plus de pages, car c'est lui qui présente le plus de difficultés!
Ainsi, la photo ci-contre présente le premier dépliant, celui qui est consacré à l'indicatif présent des verbes des trois groupes ainsi qu'être et avoir, à la voix active.
Fabriqués eux aussi par les élèves, les carnets sont de différents formats. Leur nombre de pages varie en fonction des besoins.
Les élèves les remplissent au fur et à mesure de leurs découvertes et des difficultés abordées. Ainsi, par exemple, un des carnets présente le système de la conjugaison, un autre est consacré aux
astuces et aux phrases mnémotechniques qui facilitent la rétention de la conjugaison de verbes présentant des particularités.
Les dictons, proverbes et maximes permettent de travailler la conjugaison avec des verbes de différents groupes, généralement à la 3ème personne du singulier ou du pluriel, celle qui sert le plus dans les textes en général.
Les élèves lisent la phrase proposée et cherchent à en comprendre le sens, puis après avoir repéré les verbes conjugués et indiqué leur groupe, ils les conjuguent en fonction des temps qu'ils ont étudiés. Au complet, il s'agit des huit temps de l'indicatif (le passé antérieur pose un peu problème) et des deux temps usuels du conditionnel. Avec certains dictons qui s'y prêtent, les élèves travaillent le présent et le passé de l'impératif.
Voici un des quelque cinq cents dictons que j'ai réunis et classés, et qui feront partie d'un livre de conjugaison :
3e groupe 2e groupe
"Ce qui croît soudainement périt le lendemain."
croissait périssait
croîtra périra
crût périt
a crû a péri
avait crû avait péri
etc.
Individuellement ou ¨par groupes de deux ou trois, les élèves recherchent et relèvent les points communs qui existent entre les verbes, généralement par paire (j'en ai répertorié plus de cinquante). À certains modes et temps simples, nous disons la même chose (ou parfois presque la même chose), mais nous l'écrivons différemment. C'est le contexte qui nous aide à faire le bon choix orthographique.
Ainsi, par exemple, qu'ont en commun (homophonie) les verbes serrer (1er groupe) et servir (3e groupe) ?
Soit les élèves ont des idées qui leur viennent, soit, avec ou sans l'aide du tableau muet, ils récitent les deux verbes à chaque mode, chaque temps simple et chaque personne, en étant attentifs aux similitudes. Serrer et servir ont en effet quelques points communs (certaines paires de verbes en ont beaucoup plus) :